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POINT DE BASCULE

le 20 septembre 2021

De retour de congés, je sors la tête du berceau. Je quitte un nid tendre et joyeux, et découvre une tristesse ambiante. 

"La tristesse à Kaboul, comme à Cergy, c’est la soumission. C’est la soumission à la domination. La tristesse, c’est quand le dominé accepte et même collabore à son propre asservissement. La tristesse, c’est quand on entend la certitude de l’inéluctable", disait Daniel Mermet dans "Là-bas si j’y suis".

Comme il en faut du courage pour résister, pour défendre et se tenir debout. En Palestine, comme en France. En Afghanistan comme en Ethiopie.

Notre impuissance momentanée à contrer les forces d’immobilisme face aux bouleversements du climat est terrifiante. La violence avec laquelle les puissants se battent pour conserver leurs privilèges et leur régime est foudroyante. La tristesse de se voir englué.e.s dans des débats les uns contre les autres est fatigante. La difficulté à faire commun dans une société qui impose un individualisme forcené est sidérante.

Mais, rien n’est joué, rien n’ai perdu.  Rien n’est certain, nos enfants arrivent et l’histoire ne fait que commencer !

En cherchant à comprendre le présent, j’ai aimé la parole synthétique et lucide de Barbara Stiegler : "Les autorités détournent les questions sanitaires pour instaurer une société de contrôle". Elle poursuit : "Il faut bien comprendre que la Covid-19 n’est qu’une répétition générale. Ce n’est qu’un épisode parmi d’autres de la crise écologique.  Des événements similaires risquent de se reproduire à l’avenir, avec la dégradation des écosystèmes et le réchauffement climatique.  Il faut donc dès maintenant les anticiper, réfléchir à la manière dont nous souhaitons les surmonter, démocratiquement et non sur un mode autoritaire."

Alors regroupons-nous. Faisons groupes, tribus, communautés, faisons corps. S’il y a une chose que la Covid nous a appris, c’est que si un humain est touché quelque part, cela nous touche tous !

Au-delà des clivages orchestrés, remettons notre coeur à l’ouvrage, et quand les flux d’infos accaparent nos raisonnements, il reste l’intelligence du coeur. Commençons par refuser la tristesse, en faisant alliance avec les opprimé.e.s, entre opprimé.e.s.

 

Passons à l’action, pour contribuer aux basculements les plus féconds ! 

"À la notion d'effondrement, qui dépolitise les enjeux en postulant une trajectoire unique et comme jouée d’avance, on opposera celle de basculements, qui permet de faire place à l'imprévisibilité croissante de notre temps et au rôle central de la mobilisation politique. Des basculements se produiront en effet, à relativement court terme, sur fond d'une crise systémique du capitalisme, certes produite par les "contradictions" environnementales qui ravagent la planète, mais aussi par des tensions internes entre un capitalisme fossile et un capitalisme techno-"écologique" "  , Jérôme Baschet.

Il est temps que la bascule ne soit plus un point de non-retour, mais un levier qu’on actionne de tout son poids, de toutes ses forces. Il faut opposer à la tristesse de la soumission,  la joie de la lutte collective. 

"En ce sens, la joie n’arrive pas lorsque que l’on évite la douleur,  mais en luttant dans et à travers elle. Faire de l’espace aux sentiments collectifs de rage, de deuil, ou de solitude peut être profondément transformateur. L’Empire, au contraire, travaille à maintenir ses sujets coincés dans une tristesse individualisante : bloqués dans des habitudes et des relations appauvrissantes, toxiques et privatisées. Cette stagnation peut être entretenue par la recherche du bonheur et la tentative de neutraliser ou d’éviter la douleur. Être plus entièrement présent·e, au contraire, veut dire s’ouvrir à ce qui nous affecte et participer activement aux forces qui nous façonnent." Carla Bergman et Nick Montgomery.

Vivre joyeusement, c’est-à-dire précisément, vivre avec les autres, tous les autres, et lutter pour un monde plus juste.

Ici, les anciens répètent que les héros n’existent pas, il y a juste des gens qui font ce qu'ils peuvent quand les autres ne le font pas. Ça commence par ne rien céder aux pièges des débats qui nous divisent et divertissent.

Additionnons nos forces, nos poids, nos cœurs modestes et géniaux, notre ardeur, 

Pour qu’enfin, ça bascule…

Alors, lorsque ce sera au tour de notre petite de sortir sa tête du berceau, je souhaite ardemment qu’on ait les uns et les autres continué à se battre pour un peu plus de solidarité, de coopération, de commun et communautés… et que ses premiers pas dans notre société soient …des pas de joie! 

La petite équipe de l’Escargot,

( Qui à hâte de vous retrouver, dans nos espaces de formations professionnelles, notre espace de recherche sur les Rituels, Célébrations et cérémonies, et sur nos ateliers à prix libres. Les formations sont toutes complémentaires, et des parcours de plusieurs formations sont proposées! )

 

A lire et à écouter :

Joie militante, Construire des luttes en prise avec leurs mondes, Carla Bergman et Nick Montgomery, traduction Juliette Rousseau, Edition du Commun 

Basculements Mondes émergents, possibles désirables, Jérôme Baschet, Éditions La Découverte 

De la démocratie en pandémie : santé, recherche, éducation, Barbara Stiegler, Gallimard, 

Emission Là-bas si j’y suis: https://la-bas.org/

 

 Photo prises  par Tanguy Hoanen / Mathieu Gary